Chronique de Feumba Samen : Sismondi Barlev Bidjocka, meilleur éditorialiste dans la tourmente

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Chronique de Feumba Samen : Sismondi Barlev Bidjocka, meilleur éditorialiste dans la tourmente

Des voix éditoriales se sont élevées au-dessus de la clameur politico-politicienne Camerounaise avec des mots que les Camerounais n’oublieront jamais. Mais aussi avec un vocabulaire qui a coulé comme l’eau sur les plumes d’une oie pour tomber dans les oubliettes. De 2018 à 2020, les éditoriaux sont allés dans tous les sens. Chacun y mettant sa plus belle voix. Ses couleurs. Ses choix de mots. Son orientation politique. Sa haine de l’un ou son amour de l’autre. La difficile ligne médiane analytique n’ayant presque jamais été trouvée.

Ni adepte ni adversaire

Certains ont plaidé en faveur de l’annexion du Cameroun. Mais comme l’a écrit l’historien Julius W. Pratt, les ‘mots utilisés n’ont pas gagné de terrain.’ Les Camerounais étant aphones à toute toile d’araignée de droits de recolonisation et de continuité d’exploitation de leur pays. Brisant ainsi le piège des éditoriaux tendancieux qui aurait permis de renouer leur destin au pacte colonial. Et par-delà, anéantissant la stratégie des impérialistes à vouloir s’enraciner encore plus au Cameroun, s’étendre et posséder tout le Golfe de Guinée.

Sismondi Barlev Bidjocka, modeste patron-indépendant de RIS 105.8 FM, une station radio-indépendante émettant à Yaoundé, s’est illustré par une ligne éditoriale contraire. Liberté de ton. Champ rédactionnel varié. Analyse pointue. Rigueur dans le choix des mots, expressions, concepts, et citations.

Ni adepte ni adversaire inébranlable. Bidjocka a une identité—‘Ne rien dire pour nuire. Ne rien taire pour plaire.’ Il critique sans prendre des gangs. Apprécie avec des expressions qui élèvent. Il est le balancier juste du juste milieu.

Guerre pour guerre

Le langage non-biaisé. Direct. Sec. C’est la ‘marque Bidjocka.’ Celle qu’il utilise contre les dirigeants et autorité ‘arriérés et autodestructeurs.’ Publie contre eux une chape de raisonnement froid. Il est de la chapelle de William Allen White de l’‘Emporia Gazette,’ qui n’enjolivait pas ses mots pour critiquer les politiques. Le 15 Août 1896, il a écrit, ‘nous avons ratissé le tas de cendres de l’échec humain dans l’Etat et avons trouvé une vieille jupe cerceau d’un homme qui a échoué en tant qu’homme d’affaires, qui a échoué en tant que rédacteur en chef, qui a échoué en tant que prédicateur, et nous allons le faire élire membre du Congrès.’

Lire White, c’est écouter Bidjocka. ‘Peut-être à cause de [sa] tendance systématique de dire la vérité’ qui le rapproche du radicalisme-patriotique du journaliste Britannique H G Wells pour ‘Daily News and Leader’ qui, plaidant pour la guerre contre l’Allemagne militariste, a publié le 14 Août 1914 ‘La guerre qui mettra fin à la guerre.’ Un article tendancieux affirmant qu’‘un tel cataclysme conduirait à une société améliorée en permanence.’ Argumentant, il a écrit. ‘Nous voulons vaincre. Nous sommes préparés à chaque catastrophe, à des stress intolérables, à la faillite, à la faim, à tout sauf à une défaite.’ Ces mots pour la défense de sa patrie, Sismondi les a dits autrement quand il fallait défendre son pays contre l’invasion impérialo-endocolons à travers le NOSO.

Soldat du micro

Ce talentueux journaliste n’est pas seulement une voix qui porte. Il est une âme qui ne se souille pas au contact de l’interdit—le concubinage incestueux. Son éthique ne lui vaut pas toujours des lauriers. Plus d’ennemis que d’adversaires. Menaces. Resserrement du cordon de la bourse. Il connaît tout ça. Mais la menace la plus lourde pèse sur la cessation d’émettre de RIS Radio—l’outil. ‘Nous ne savons pas combien de temps il nous reste à vivre dans cette situation.’ A dit Sismondi Bidjocka dans son édito du 22 Décembre 2020. Pourtant, en trois années de vie, RIS a été ‘classée meilleure de la Capitale dans sa catégorie après trois sondages media-métriques.’

Honnête avec ses auditeurs, et ‘pour que personne ne [lui] pose la question plus tard’ pourquoi RIS a fermé, Bidjocka a ‘anticipé pour [leur] parler de [la] descente aux enfers au cours de l’année 2020’ de son entreprise médiatique.

Bidjocka comme  Gaba et Zongo

Dans les années ’90 Norbert Zongo, journaliste d’investigation Burkinabè—Fondateur et Directeur de publication de l’hebdomadaire ‘L’Indépendant,’—avertissait sur la menace qui pesait sur son journal. Mais plus sur sa vie. Personne ne l’avait écouté. Le 13 Décembre 1998 il est assassiné-calciné par un commando conduit par l’Adjudant-Chef Marcel Kafando, décédé le 23 Décembre 2009.

Il avait été assassiné dans l’exercice de sa profession de journaliste à Sapouy, au bord de la Route Nationale 6 (Ouagadougou-Léo). Notamment dans l’enquête sur l’assassinat de David Ouédraogo—Chauffeur de François Compaoré, frère-cadet de l’ex-Président déchu Blaise Compaoré—Lire ‘Les Guerres Secrètes AntiGbagbo’ publié par cette plume, chez la Doxa Editions.

Zongo choquait par ses éditoriaux. Il en est mort. Bidjocka blesse par les siens. Sa radio pourrait fermer. Si non, sa vie pourrait être en danger. Zongo était, et Bidjocka est, ce que Saleh Gaba, l’un des meilleurs journalistes Tchadien de son temps, disait à cette plume encore dans les rues en caleçon. ‘Le journalisme qui ne choque pas par la vérité, n’est pas du journalisme.’

Syndrome de valeur

Bidjocka comme Zongo, est déjà victime du ‘syndrome de valeur.’ Ce mal qui abat au vol des personnes qui osent réussir sans tricher dans ‘une société de mise en scène. Une société où une non-valeur devient une valeur.’ Comme disait Charles Ateba Ayene. Sismondi, ce patriote et ‘soldat du micro,’ va peut-être se retirer du service de son pays. Puisqu’il lui est ‘impossible de demander l’aide de la presse que le gouvernement à travers le Ministre de la Communication apporte à la presse privée.’ A-t-il déclaré. Parce que, dans ‘ce Département ministériel’ on ‘déshabillerait les journalistes dans les bureaux.’ Ailleurs, une telle valeur sûre aurait été secourue. Les auditeurs auraient, en toute libéralité, injecté des fonds dans le capital de RIS.

Aux Etats Unis, ‘The River’ 104.9 FM au Centre de Ohio ou Hillsdale College au Nord de cet Etat, sont deux institutions parmi des milliers qui ont refusé le financement de l’Etat pour jouir de leur liberté conceptuelle. En retour, elles sont financées, pour la première par ses auditeurs. Et pour le second par les parents et anciens étudiants. En plus, ces institutions reçoivent les contributions des personnes de bonne volonté.

Grandeur d’esprit

Une telle attitude éviterait le crash à RIS Radio qui n’est pas encore au bord du gouffre. Barlev Bidjocka a simplement tiré sur la sonnette d’alarme. Mais si cela devrait arriver, il s’est préparé à crasher seul. Car, avoue-t-il, ‘l’environnement n’est pas si mauvais que ça. Certains parviennent à s’en sortir.’ Honnêteté si peu répandue au Cameroun où l’on fait porter la responsabilité de ses malheurs par d’autres.

En plus, de bonne foi, il a une prière pour ceux qui réussissent dans cet environnement hostile. ‘Nous demandons à Dieu de les préserver pour les emplois et la République.’ Grandeur d’esprit! Parce qu’il a ‘prouvé qu’il compte parmi les meilleurs et sait faire très bien ce qu’il sait faire et ne regrette pas d’avoir osé.’  

Bidjocka, le meilleur

‘Personne n’étant infaillible, il est possible qu’il ait fait des erreurs.’ Mais il sait porter sa croix. Personne n’égorgera de porcs gras. Ni sabler le champagne. Car Bidjocka est un baroudeur. Quelqu’un qui ne baisse pas les bras. Et les meilleurs ne meurent pas.

Sismondi Barlev Bidjocka, parce qu’il est pour le moment le meilleur des éditorialistes du Cameroun, va rebondir. Sûrement!

 

Par Feumba Samen

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